Le football français est longtemps passé pour un indécrottable romantique, dont on célébrait les glorieuses défaites, Séville 1982 par exemple, tandis que les autres nations accumulaient les titres. Fidèle à ce qu’il était sur le terrain, un travailleur de l’ombre et un apôtre de la victoire avant tout, Didier Deschamps a transformé son équipe de France en une terrible machine à gagner. Ironie de l’histoire, pour quelqu’un qui était surnommé « la Dèche » et a connu le cauchemar bulgare de 1993.
Dimanche 15 juillet, au stade Loujniki de Moscou, les Tricolores se sont montrés impitoyables (4-2) face à des Croates méritants, pour remporter le Mondial 2018. Pendant que le président russe Vladimir Poutine, enfin sorti de sa tanière, s’éloignait sous le déluge moscovite comme étranger à la joie tricolore, les joueurs français pouvaient brandir un trophée historique, vingt ans après les deux coups de tête victorieux de Zinédine Zidane au Stade de France. 1998-2018, le lien est tout trouvé : le capitaine Didier Deschamps devenu le sélectionneur Didier Deschamps.
A défaut d’être impressionnante par son niveau de jeu, cette finale, décousue, a été la plus prolifique depuis l’unique sacre anglais à domicile face à la RFA en 1966 (4-2). Qu’importe la manière, dans dix ans, seule cette deuxième étoile ajoutée au maillot tricolore pendant l’été moscovite restera. La leçon de l’Euro 2016 a été bien apprise. Deschamps n’aime pas perdre et c’est certainement pour cela qu’il a presque tout gagné dans sa carrière : notamment deux Ligues des champions, un Euro et, désormais, deux Coupes du monde… « Une finale, cela se gagne, oui. Parce que celle qu’on a perdue il y a deux ans, on ne l’a toujours pas digérée », avait-il dit mardi soir.
Les bras tendus vers le ciel et le poing rageur, le sélectionneur tricolore pouvait laisser exploser une joie mêlée à sa légendaire rage de vaincre. Après le Brésilien Mario Zagallo et l’Allemand Franz Beckenbauer, il peut désormais s’enorgueillir d’être le troisième à avoir gagné la Coupe du monde à la fois en tant que joueur et en tant qu’entraîneur.
Une performance inimaginable pour celui qui, au départ, n’était jamais le meilleur footballeur, ni le meilleur entraîneur, mais qui a toujours su transmettre sa hargne et sa détermination à un groupe. « C’est tellement beau, tellement merveilleux, a-t-il exulté, Je suis super heureux pour ce groupe-là, car on est partis de loin quand même. Cela n’a pas été toujours simple, mais à force de travail, d’écoute… Là, ils sont sur le toit du monde pour quatre ans. »
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